Depuis deux ans, la palissade du chantier de rénovation du Musée de La Poste est aux mains de street artistes.
SONAC Sophie Photographe vient d’y afficher une douzaine de pigeons voyageurs géants…
Ce sont des pigeons qu’elle a fait se poser sur la palissade du chantier de rénovation du Musée de La Poste. Une douzaine. Aux robes claires, sombres, marbrées…

(Photo Thierry Debonnaire)
Grandeur bien plus que nature, imposants, telles des statues d’Horus en surplomb du trottoir.
Certains font face aux passants, d’autres les regardent de profil, la tête parfois un peu penchée, comme pour mieux les observer.
Qu’est-ce qui a poussé SONAC Sophie Photographe à placarder ces photos géantes de volatiles urbains parfois mal-aimés, elle qui le plus souvent essaiment les villes d’éléphants, de tigres, de lions… ?

« On a eu de bons contacts avec les passants en collant les photos, des gens nous ont dit que c’était sympa de voir des artistes travailler, d’autres auraient même été intéressés pour avoir ces photos chez eux… », SONAC Sophie Photographe. (Photo T. Debonnaire)
« Quand elle m’a proposé de prendre la suite des street artistes qui habillent à tour de rôle cette palissade depuis deux ans, Céline Neveux, la commissaire de cette exposition originale initiée par le Musée de La Poste, m’avait parlé des pigeons voyageurs utilisés par les services postaux pendant le siège de Paris en 1870, raconte-t-elle, et comme peu de temps auparavant j’avais réalisé pour la première fois des clichés de pigeons chez un ami, j’y ai vu comme un signe, l’idée m’a plu, je me suis lancée. »
« Sauvages », en voie de disparition, exotiques comme plus proches, l’artiste aime tous les animaux. Sa passion pour eux remonte à loin.
Si depuis des années, elle colle leurs photos sur les murs des villes, de préférence dans les quartiers populaires (« C’est plus simple, mieux reçu, les gens sont demandeurs, et puis les façades de vieux bâtiments, d’usines, les passages, la diversité des matériaux, les dégradations aussi parfois, c’est ce que j’aime, ce qui m’intéresse »), c’est enfant qu’elle s’est sentie « habitée » par eux.

« Toute petite, je rêvais d’animaux géants, de girafes, d’éléphants, de félins… »
« Toute petite je rêvais d’animaux géants, de girafes, d’éléphants, de félins, se souvient-elle, encore aujourd’hui, il m’arrive en dormant de voir des chats se transformer en panthères, qui grossissent, vont, viennent, détalent. C’est une attirance irrépressible, et toujours respectueuse. »
Pour cette fresque du Musée de La Poste, la photographe et street artiste a travaillé selon son habitude. D’abord en repérant le lieu, pour concevoir un projet en cohérence avec lui, son environnement, sa destination…
« Je voulais que ce soit graphique, que les pigeons soient d’espèces différentes, indique-t-elle, qu’il y ait des nuances de couleurs, de positions, d’attitudes. »
Sont ensuite venues les prises de vue. Toujours en noir et blanc, relevées au final de sépia, sa marque de fabrique.
« Quels que soient les animaux qui m’intéressent, je les effectue systématiquement dans des parcs animaliers, explique SONAC Sophie Photographe, au-delà même du coût, les réaliser dans le cadre de safaris ne convient de toute façon pas à ce que je fais, c’est difficile de s’approcher vraiment des animaux, il y a beaucoup d’obstacles, de végétations qui peuvent gêner. »
La photographe a ainsi pris plus de 150 clichés de pigeons issus de trois élevages différents. Et en a sélectionné douze. Qu’elle a préparés et adaptés dans son refuge-atelier de Bourgogne.
« Quand j’ai commencé la photo, je travaillais en argentique, mais depuis une dizaine d’années, je suis passée comme à peu près tout le monde au numérique, précise-t-elle, je continue cependant à pratiquer le numérique avec l’esprit et l’équivalent des techniques de l’argentique. »

(Photo SONAC Sophie Photographe).
C’est à l’aide d’une imprimante autorisant les très grands formats que SONAC Sophie Photographe a réalisé les tirages papier – de véritables lés – destinés à être collés sur la palissade du musée.
« Cette imprimante, je l’appelle parfois mon agrandisseur, c’est toujours mon côté argentique, sourit-elle, c’est un outil précieux, il a beaucoup de qualités, en particulier celle de rendre des noirs très profonds. »
Les pigeons, qui semblent désormais garder le Musée de La Poste, portent le même regard et le même message que tous les autres animaux apposés un peu partout dans les villes par SONAC Sophie Photographe sur les murs : ils nous observent tranquillement, ne semblent pas nous juger, suscitent et attendent nos réactions.

« Pour moi, ils disent vous nous avez chassés, avec ces photos on revient, toujours libres, et vous, que faites-vous de votre liberté, regardez-nous, regardez-vous. », SONAC Sophie Photographe.
« Pour moi, ils disent vous nous avez chassés, on a perdu beaucoup de nos espaces, avec ces photos on revient, et on est toujours libres, explique l’artiste, et vous, que faites-vous de votre liberté, regardez-nous, regardez-vous. »
Le nom de SONAC Sophie photographe ne figure pas sur sa fresque du Musée de La Poste. Ni d’une manière générale sur aucune de ses œuvres.
« Il n’est pas nécessaire que j’apparaisse, c’est mon travail que je mets en avant, pas moi » dit-elle simplement.
Un travail à ne pas oublier d’aller voir. C’est jusqu’en janvier devant le Musée de La Poste…
Rodolphe Pays
Ralentir Street Art
Une exposition proposée sur la palissade du chantier de rénovation du Musée de La Poste pendant toute la durée des travaux.
Jusqu’au 14 janvier, SONAC Sophie Photographe.
En savoir plus : http://sophiephotographe.com/.
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